Il y a dans mon jardin un rosier cinquantenaire, ensauvagé, dont je ne connais pas le nom. Chaque fin de printemps, ses fleurs éclosent en mouchoirs chiffonnés, elles embaument au vent qui les agite. Les premières en bouton depuis plusieurs jours sont nées aujourd’hui, délivrées ensemble par la chaleur soudaine. Elles durent une semaine ou deux, au cours de floraisons successives, puis elles se racornissent et seul l’arbuste désolé persiste, orphelin de roses et bientôt de feuilles pour s’assoupir jusqu’à la belle saison suivante, métamorphosé en un buisson sans attrait de branches enchevêtrées. Pour ces quinze journées de splendeur parfumée, il conserve malgré sa laideur ordinaire la persistance de mon admiration fidèle et sa place dans le jardin. D’ailleurs, si l’on compte bien le temps passé depuis qu’il fut planté, il a fleuri bien plus d’une année.

Le rêve vous indispose et
vous riez
du rosier nu et mal peigné
l’arbuste étoilé par l’araignée
vous riez
à la nuit du ciel entoilé
tissé dans le buisson barbelé
vous riez
de l’éphémère effort hardi
pour enfanter un doux paradis

mais entre la ronce et le voile
embaume une rose en soie pâle
un paon-du-jour né à l’aurore
abrité sous le filet d’or
butine à la corolle opale
le miel de sa moisson d’étoile

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