Cette nuit, j’ai relu l’Étranger, d’Albert Camus. Après l’Arrache-cœur de Boris Vian, je me rappelle la base solide de ma conception de la littérature, imaginaire ou non. La mienne.
Que les mots s’envolent ou n’établissent presque aucun dialogue pour se raconter, l’écrivain est au service de l’idée qui le ronge, il oublie le style comme une finalité. La forme que prendra l’architecture du roman ou de la nouvelle, sa longueur, le ton employé comme le vocabulaire, rien n’est suborné à autre chose que l’idée qui a provoqué l’envie de l’écrire.
Le reste est une affaire de métier qu’il ne faut pas négliger, sérieuse.
Et dans le fond, quoi de plus naturel qu’une création, indépendante dès lors qu’elle a été conçue, prospère puis naisse et reçoive les soins les plus attentifs, comme un embryon devient le nourrisson qu’on lave et habille pour le couvrir chaudement et le présenter.

 

2 réactions à “Note d’écriture #4 L’étranger

  1. Dans l’absolu, je ne sais pas si c’est mieux, mais j’ai quand même bien l’impression qu’une œuvre est plus juste, plus près de sa vérité quand la forme dépend du contenu que lorsque le contenu est subordonné à la forme (c’est pour ça que je n’ai jamais réussi à écrire de nouvelles correctement : je voulais absolument que ça tienne en 20 000 signes !)

  2. D’abord, merci de continuer de t’intéresser à mes notes, c’est agréable de tout à coup discuter. 🙂
    L’absolu ne me tente pas du tout parce qu’il est borné par des limites, comme la valeur mathématique, je suis juste moi, et c’est déjà bien suffisant à contrôler ! J’ai bien précisé pour cette raison que je parlais de ma conviction, forgée par l’ogresse lectrice dévorée par l’énigme de l’écriture depuis l’enfance, avec l’exemple d’écrivains qui m’ont marquée. J’en ai aimé, et aime toujours, beaucoup d’autres pour des motifs différents, et même, parfois, ceux qui me laissent (au présent, car je continue de lire et ils ne sont pas tous morts ^^) une trace indélébile ne sont pas forcément célèbres ni ceux que je préfère, je suis aussi incapable de les relire avec dévotion, mais uniquement saisie d’une soudaine fougue.
    Je pense qu’ils réussissent, parfois, à s’oublier en écrivant pour se consacrer seulement à cette idée qui les tenaille tant qu’ils doivent l’écrire quelque soit la forme qu’elle prendra, en reléguant à l’arrière-plan l’accueil et le futur espéré. Cela en plus de l’autre pulsion qui pousse à écrire plutôt qu’à peindre ou à cultiver un jardin, ou à composer de la musique, qui demeure pour moi totalement mystérieuse sinon que « la création est parfaite », l’acte, bien sûr.
    Je n’ai la sensation d’écrire « réellement » qu’en suivant cette conception, ce qui n’a évidemment rien à voir avec une réussite quelconque à la fin pour un éditeur ou le public, l’objet de la création n’est pas parfait, ça se saurait. ^^ Ce qui ne m’empêche pas de recommencer pour le plaisir de l’acte et toujours espérer l’améliorer quelle que soit la forme qu’il prend en cours.

    …après, je ne jurerai pas sur la quête d’une vérité quelconque dans mes « œuvres », ahem, pas plus que dans celles de Camus ou Vian, malgré leur notoriété, seulement une idée qui taraude et ne peut souffrir qu’on la mette en forme et en style. Et quand on recense le nombre d’interprétations qui s’affrontent à propos d’un récit, la vérité est changeante. 😉

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