Je ne suis pas autrice et je ne le serai jamais.

Ce mot représente une résurgence d’un vocabulaire académique, quel que soit le bout par lequel on le prenne. Il fut l’enjeu d’un combat mené par des femmes de pouvoir pour elles-mêmes qui se moquaient comme d’une guigne des femmes — et des humains en général, hommes ou femmes, d’ailleurs — qui n’appartenaient pas à leur classe sociale. Exploiter ce pan d’histoire pour établir un précédent, c’est encore une fois placer la lutte sur le plan du pouvoir pour se l’approprier, je ne suis pas de ces féministes qui veulent être des princesses.
Note : la logique voudrait aussi que l’on récupère les autres mots : philosophesse, peintresse, etc.

La campagne actuelle en faveur du mot autrice se pare d’attributs académiques, lesquels ont toujours été du domaine masculin et se fondent sur la tradition ancrée dans le passé monarchique. Le mot auteure a été employé par les féministes francophones dans le monde entier, l’avis de l’Académie française n’a pas été requis ni l’approbation de ceux qui estiment détenir la culture comme leur propriété. C’est un mot international en langue française, militant depuis des dizaines d’années. Il ne s’intéresse pas aux racines, mais aux bourgeons de l’avenir, il est imparfait, mais utile, il était rentré dans les mœurs. Il était le premier jalon pour une transformation.

Cette campagne porte préjudice à plus d’un siècle de féminisme en recentrant le débat sur un terrain qui n’est pas celui de l’égalité, mais bien sur la supériorité d’une classe, d’une culture spécifique et d’un territoire.

Je ne suis pas autrice et je ne le serai jamais, ce mot ne milite pas en faveur de l’égalité pour tous. À une époque où l’on lutte pour la reconnaissance de l’être humain quel que soit son aspect et sa sexualité, il va à l’encontre de mes convictions anti-sexistes.

2 réactions à “Ni princesse ni autrice

  1. Chère auteure
    Moi, j’utilise les deux. Quand je m’adresse à une amie qui, je le sais, n’aime pas le mot « autrice », je lui donne du « auteure ». Quand je corresponds avec une autre amie qui ne jure que par le mot « autrice », c’est de ce terme que je la qualifie. Quand dans un texte je ne sais pas quoi faire, il m’arrive d’employer les deux (bien pratique pour atténuer les répétitions). Les deux termes ont leur légitimité, quels que soient les efforts de leurs adeptes pour délégitimer celui qui leur donne des boutons. L’usage fera le reste. Et peut-être, avec le temps, parviendrons-nous à une langue débarrassée des pièges du genre, qui fait de l’emploi du moindre mot, fût-il bienveillant, une guerre de tranchées. Salutations amicales de l’ours, madame l’auteure… 🙂

    1. Cher auteur,
      A la différence que je ne milite pas pour l’officialisation d’un mot et la volonté forcenée de l’imposer avec des arguments qui me heurtent pour en légitimer, justement, l’origine pas des masses populaire… Cette obsession latine et historique pour imposer un mot, sans cesse appuyé par des explications vaseuses où les femmes sont toutes des princesses de l’Académie française, occupe bien le buzz intellectualiste. En l’occurrence, je contre-milite sans buzz assorti pour rappeler qu’auteurE existe depuis fort longtemps, utilisé par des femmes militantes qui n’ont pas demandé la permission de l’employer à l’Académie avec un formulaire de légitimité monarchique.

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