Le coucou et le bûcheron
À l’aube, près de la ferme des Trois-Ponts, le printemps s’éveillait. Dans le verger, armé d’une scie, un homme ahanait en haut de son échelle appuyée contre le houx, lequel oscillait sous le va-et-vient de l’outil. L’arbre s’était vengé de l’assaut en piquant les bras, les jambes et les joues de son persécuteur, avec pour seul résultat d’encourager au travail son ardeur.
La scie roulait des dents et mordait la branche où s’égosillait un gros oiseau gris. Les oreilles protégées sous son bonnet, le bûcheron ne l’écoutait pas. Quand il l’avait vu, il l’avait cruellement injurié :
« Sale coucou ! Tu voulais pondre l’œuf de la discorde au sein du foyer paisible de tes cousines. Tu ne mérites pas que je préserve l’arbre de tes méfaits à venir, parasite ! Assassin d’oisillons sans défense ! »
L’accusé ne put nier le destin funeste qui l’accablait lui et les siens, il implora la clémence pendant qu’en tristes copeaux s’effritait son perchoir.
« Je croyais être chanteur, rossignol, rouge-gorge ou merle moqueur, et tu m’apprends qu’il n’en est rien. Je ne suis bon qu’à crier l’heure à l’horloge dans ta maison. Je n’étais pas coupable, hier, d’appartenir à l’espèce abandonnée par ses parents dans un nid anonyme. J’avais oublié ma prime enfance meurtrière. Épargne-moi en souvenir de mon innocence perdue à la naissance ! »
Mais le bûcheron sourd à ses lamentations entamait le tronc, résolu à détruire le crime avant qu’il ne fût commis. Les coucous, on le sait, se reproduisent aux dépens de la société aérienne, et dans le houx nichait la colonie populeuse de grives que l’homme pouvait sacrifier pour s’en faire un dîner.
Le coucou se tut, son corps ingrat gonflé de chagrin, puis comme un corbeau réputé pour sa voix désaccordée, il crailla son désespoir.
« Tu as raison ! Je me suis efforcé d’ignorer la vérité, j’allais pondre ici dans un abri façonné par les grives, car malgré mes tentatives, je n’ai pas réussi à construire le mien. Épargne l’arbre et mes voisines ! J’étais invisible, elles ne savaient pas qu’elles toléraient la présence d’un criminel en puissance. Inutile de reproduire mon sort peu enviable, je pars. Adieu, bûcheron. »
Le coucou s’envola le cœur lourd, plus haut, toujours plus haut dans le ciel vers les nuages. Peut-être imaginait-il qu’ils l’accueilleraient au creux de leurs nids cotonneux.
Son ascension l’emporta jusqu’à l’air raréfié des altitudes, il s’évanouit et tomba. Hélas, il ne reprit pas connaissance quand il expulsa son œuf pendant la chute. Avant de pouvoir prévenir son rejeton de l’héritage maudit, la mère indigne s’écrasa entre les souches d’un arbre en majesté. Seule une mouche honora sa mort de quelques vers.
En haut du chêne, l’œuf a éclos dans le nid de mésanges charbonnières, lesquelles, on le sait, possèdent un bec assez dur pour percer les crânes de leurs victimes et manger leur cervelle.
« ŒUFS », illustration d’Adolphe Millot (1857-1921), Nouveau Larousse Illustré (1897-1904), volume 6, page 473
1 Bondrée, 2 Faucon, 3 Épervier, 4 Merle, 5 Grive, 6 Freux, 7 Bruant proyer, 8 Gros-bec, 9 Moineau, 10 Pinson, 11 Pitpit, 12 Bruant des roseaux, 13 Coucou, 14 Petit oiseau-mouche, 15 Bec-croisé, 16 Troglodyte, 17 Sittelle, 18 Rossignol, 19 Roitelet, 20 Accenteur, 21 Bruant fou, 22 Effarvate, 23 Rousserolle, 24 Fauvette, 25 Mésange, 26 Hypolais, 27 Jaseur, 28 Loriot, 29 Jacana, 30 Grouse, 31 Lagope, 32 Faisan, 33 Perdrix, 34 Caille, 35 Avocette, 36 Chevalier arlequin, 37 Pluvier guignard, 38 Pluvier de Virginie, 39 Vanneau, 40 Chevalier cul-blanc, 41 Sterne hybride, 42 Hirondelle de mer, 43 Sterne Ruppell, 44 Goéland, 45 Plongeon, 46 Guillemot, 47 Grand pingouin, 48 & 49 Macareux, 50 Grèbe, 51 Emy, 52 Tortue mauritanique, 53 & 54 Les roussettes (Scyliorhinidae), 55 Les requins, squales, 56 Chimère, 57 Lamproie, 58 Seiche, 59 Arctia, 60 Acidalie, 61 Nemoria, 62 Colias, 63 Diloba, 64 Satyre, 65 Cyclopide, 66 Laphygma, 67 Acosmétie, 68 Ennemos, 69 Attacus, 70 Limenitis, 71 Bryophile, 72 Eubolie.