On ne parle guère de Johann Beer en France, un lointain habitant de la Saxe. Bien sûr, d’aucuns me répliqueront que son existence remonte au XVIIe siècle quand il exerçait le métier de musicien à l’instar d’une kyrielle d’artistes attachés à la cour ou aux chapelles. Cependant, Johann Beer, compositeur, chanteur, violoniste et claviériste, fut aussi écrivain, très apprécié de ses contemporains. Parmi ses œuvres littéraires, Bellum musicum occupe une place particulière, car — si j’ai bien compris les documents allemands et anglais — il y expose à la mode des « batailles grammaticales » — genre prisé depuis le XVIe siècle — ses conceptions musicales avec l’aide d’un combattant très étonnant comme vous pouvez le constater.

Johann Beer (1655 – 1700), Bellum musicum, 1701.
K. G. Knight, Johann Beer’s Bellum Musicum, 1965.

Cette figure étrange a bien évidemment suscité ma curiosité, assez pour me renseigner sur l’auteur et découvrir une biographie succincte déposée sur le site de Musicologie et, jolie attention, d’écouter un morceau de la musique de chambre qu’il composait. Il manquait à cette entrée en matières la consistance nécessaire pour me satisfaire : que contenait donc Bellum musicum ? Un autre site, Wiley Online Library, a partiellement comblé mes désirs en proposant à la lecture un article écrit en 1965 par K. G. Knight, ou plus exactement le mettant à disposition la première page de ce texte, la suite étant payante. Si j’étais plus riche, je ne doute pas que l’intégralité aurait mieux servi ma sérendipité, mais l’introduction suffira. Elle m’apprit l’existence de deux versions, l’une de 1684, l’autre en 1701, remaniée par l’auteur et publiée à titre posthume, mais aussi que Johann Beer avait la réputation d’un écrivain imaginatif et non dépourvu du sens de l’humour. Mieux encore, le critique déclare que ce Bellum musicum inspira E. T. A. Hoffmann dans un conte des Frères de Saint-Sérapion, paru en 1819 : « Le choix d’une fiancée », en allemand, « Die Brautwahl. Eine Geschichte in der mehrere ganz unwahrscheinliche Abentheuer vorkommen » : une histoire dans laquelle plusieurs aventures très improbables se produisent… J’aime les contes d’Hoffmann et j’espère que ce détail attirera l’attention d’un germanophone musicien et amateur de fantastique, tout à coup intéressé par Johann Beer et prêt à esquisser un tableau plus complet de cet homme, on ne sait jamais.

Peut-être ai-je encore gagné ma journée en monnaie de singe, mais alors je suis une primate heureuse.

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